Avez-vous déjà entendu ou même exprimé des phrases telles que :
“C’était plus simple quand nous étions tous au même endroit”,
“Je me sens seul.e en réunion, personne ne participe”,
“Je suis fatigué.e de ne jamais voir personne en face à face”,
ou “J’ai un-e nouveau-elle collègue qui a du mal à s’intégrer” ?
Ces sentiments sont courants, surtout avec l’augmentation du télétravail. Heureusement, il existe des solutions pour renforcer la cohésion des équipes, même à distance.
Les pratiques pour un travail à distance efficace
Lors de leur visite à Agile Lyon, Grégory a interviewé Charles Bouttaz, tech lead chez Energy Pool, tandis qu’Olivier mettait en image leur échange. L’été dernier, Charles a pris le rôle de team lead d’une nouvelle équipe dont la plupart des membres étaient à distance. Ce fût l’occasion pour lui de réfléchir aux pratiques à mettre en place pour assurer le bon fonctionnement du collectif malgré l’éloignement géographique.
Le cadre de travail à distance
Charles préconise de bien démarrer les projets avec un atelier de lancement afin d’établir une vision commune et tisser des liens dès le début. Par exemple, lors du démarrage du projet, Charles à organisé un workshop de trois jours. Cet atelier intensif a permis à tous les membres de l’équipe d’acquérir une bonne compréhension de leurs rôles et responsabilités dans le projet, d’établir une vision commune, et de faire connaissance les uns avec les autres.
WIP n-1
Pour synchroniser l’équipe et encourager l’autonomie, Charles utilise un tableau Kanban. Ce tableau permet à chaque membre de l’équipe de visualiser clairement l’avancement des tâches, ce qui facilite l’identification des opportunités où ils peuvent apporter le plus de valeur, que ce soit en prenant un nouveau ticket ou en aidant un collègue qui pourrait rencontrer des difficultés.
Une pratique mise en place dans l’équipe de Charles est la limitation du travail en cours, ou WIP limit, fixée à n-1. Cela signifie que le nombre de sujets en cours ne peut excéder le nombre de développeurs moins un (4 sujets maximum pour 5 développeurs). Cette approche encourage le travail collaboratif en pair et évite que les membres se retrouvent à fonctionner en silo sur leurs sujets. La philosophie de Kanban derrière cette pratique est de “commencer à finir,” c’est-à-dire de réduire le nombre de tâches en cours pour assurer la finalisation des différents chantiers.
Le pair programming
Le pair programming est également une pratique clé adoptée par l’équipe pour traiter les tickets plus complexes. Cette méthode de développement logiciel consiste à faire collaborer deux programmeurs ou programmeuses sur le même poste. L’un, appelé le driver, est chargé de rédiger le code, tandis que l’autre, le navigateur, suit chaque ligne de code en temps réel pour s’assurer de sa validité.
Le pair programming présente de multiples avantages : il facilite la détection et la correction des oublis, réduit les risques associés aux points de défaillance unique (SPOF), garantissant ainsi la continuité du projet même en l’absence d’un des membres, mais surtout favorise la montée en compétence au sein de l’équipe tout en renforçant les liens entre les collègues.
Recrutement
Le choix du candidat
Le succès du travail à distance repose aussi sur le recrutement de personnes bien adaptées à cette configuration. Il est tout autant important d’évaluer les compétences techniques des candidats que leur aptitude à collaborer efficacement à distance. Pour identifier les candidats qui s’intégreraient bien à leur environnement, Charles interroge les candidats sur leur expérience et leurs préférences en matière de travail d’équipe. Il s’efforce de comprendre leurs attentes vis-à-vis de leur environnement de travail idéal. Lorsque cela est faisable, Charles propose également des mises en situation pratiques pour évaluer directement comment les candidats pourraient s’adapter et interagir dans des contextes réels.
Le processus d’onboarding
L’arrivée d’un nouveau collaborateur est une étape importante. Chez Energy Pool, un système de mentorat a été développé pour faciliter ce processus. Chaque nouvel arrivant est accueilli par un mentor, qui est un membre de l’équipe. Ce mentor est chargé de guider le nouveau venu, de lui expliquer les processus et modes de fonctionnement de l’entreprise, et de collaborer sur les premières tâches en pair programming. Ce système de parrainage est essentiel car il permet d’accélérer l’apprentissage grâce à des feedbacks immédiats.
En plus du mentorat, il est également bénéfique pour les nouveaux membres de rencontrer directement les différentes équipes, les utilisateurs et découvrir les métiers. Ces rencontres peuvent se faire virtuellement ou en personne, selon les circonstances, et permettent de créer des liens, de comprendre les rôles de chacun et de saisir les dynamiques de l’équipe au-delà de leur propre groupe de travail.
Les outils
Dans un environnement de travail à distance, choisir les bons outils de communication est important. EnergyPool utilise Slack pour les échanges écrits quotidiens avec des canaux dédiés par équipe ou par communauté de pratique.
Pour les daily et les jeux, l’équipe se tourne vers Discord, où des bureaux virtuels sont mis en place pour recréer un sentiment de proximité et encourager les discussions spontanées.
L’équipe de Charles organise également des journées “Painless day”, où les problèmes rencontrés sont exposés le matin (problèmes d’écran, de build, etc.). Les participants se regroupent par centres d’intérêt et utilisent les salles Discord pour interagir librement. Ils peuvent naviguer de salle en salle pour aller chercher les uns et les autres, comme s’ils étaient dans un vrai bureau, ce qui reproduit le phénomène de communication osmotique, un concept introduit par Alistair Cockburn, signataire du Manifeste Agile.
Ce concept désigne le fait d’interagir spontanément en captant les échanges au sein d’un groupe. Le travail à distance peut souvent réduire cette dynamique naturelle, mais des plateformes comme Discord pallient cette limitation en affichant les membres en ligne et disponible pour discuter, permettant ainsi aux équipes de répondre plus efficacement aux besoins en temps réel et de retrouver l’interaction et la réactivité caractéristiques d’un environnement de bureau traditionnel.
Conclusion
Maintenir des équipes à distance soudées est un défi qui exige une réflexion approfondie sur le cadre de travail et une adaptation des pratiques de l’équipe à cette configuration.
Le recrutement joue un rôle important dans ce processus : il est essentiel de sélectionner des individus non seulement compétents mais également en phase avec ce que l’on veut construire. Il également important de ne pas négliger l’on-boarding des nouveaux membres pour assurer que chaque personne se sente intégrée et prête à contribuer efficacement.
En choisissant les bons outils de communication et en adoptant des pratiques collaboratives, comme le WIP ou le pair programming, les équipes peuvent non seulement surmonter les obstacles liés à la collaboration à distance mais également en tirer parti pour améliorer leurs méthodes de travail.
Vous pouvez retrouver le replay de l’interview ici : https://youtu.be/SudP5o7PemQ