Les différentes cérémonies agiles offrent un espace à l’équipe pour discuter de ce qui se passe bien, ce qui est à améliorer dans son organisation, ses livrables, etc. Les problèmes sont adressés au plus tôt pour être traités en minimisant l’impact sur le flux de travail.
Mais que se passe-t-il quand les « vrais » problèmes ne concernent pas forcément l’activité de l’équipe, la qualité de sa production ni sa performance ? Peut-on vraiment parler de tout au daily meeting ou lors des rétrospectives ?
Le constat que je fais est que malgré toutes les bonnes volontés, il reste parfois un goût d’inachevé et certains problèmes semblent ne pas avoir leur place dans ces rituels car trop personnels, trop gênants, trop sensibles… et ne tiennent pas sur un simple post-it. Ce sont des inquiétudes ressenties, des remarques entendues, des non-dits qui consomment de l’énergie et créent une réelle charge mentale.
Je propose de vous partager dans cet article un atelier visant à libérer la parole dans l’équipe.
Le constat
J’ai accompagné une équipe assez jeune, en cours de construction où il y avait des tensions, des conflits, des incompréhensions, des craintes entre les différents membres. Des clans commençaient à se former au sein de l’équipe et une mauvaise ambiance générale se faisait ressentir.
Evidemment, la rétrospective semblait être totalement adaptée pour crever les abcès et avancer.
En effet, de nombreuses actions ont été identifiées pour s’améliorer à la prochaine itération sur le management visuel, sur la préparation des démos, sur la qualité des user stories…, mais les « vrais » sujets, ceux qui crispaient l’équipe, n’étaient pas abordés (relations interpersonnelles, qualité des échanges, bruits de couloir, …).
Tout le monde était assez satisfait des idées proposées mais repartait avec un sentiment d’accompagnement mitigé.
L’atelier
L’objectif recherché était d’offrir un espace, différent de celui des rituels agiles, permettant de décaler les perspectives en changeant l’ambiance et la typologie des interactions.
Je leur ai proposé un atelier issu des « Liberating Structures » : le Troika Consulting
Nombre de participants : 12
Durée : 30min
Matériel :
- Feuille
- Stylo
- Pas de table
Au lancement de l’atelier, on rappelle les règles : la bienveillance est de mise et la confidentialité des échanges doit être garantie par chacun.
L’équipe doit se répartir par groupe de 3 et se mettre dos à dos. Tous les participants sont invités à réfléchir au problème qui les perturbe le plus, aux interrogations qu’ils ont, qu’elles soient personnelles ou professionnelles, liées à l’équipe ou à son environnement. (1min)
Le premier « client » de chaque groupe partage sa question. Les « consultants » écoutent sans parler. (1-2min)
En face à face, les « consultants » posent des questions de clarification pour en savoir plus sur le contexte. (1-2min)
De nouveau dos à dos, « le client » écoute sans parler pendant que les « consultants » proposent des idées, des suggestions, des conseils (4-5min)
Le « client » se retourne et partage ce qui a eu pour lui le plus de valeur. (1-2min)
Le « client » devient « consultant » et on réitère l’exercice.
Résultats obtenus
Le fait d’être en petit comité (groupe de 3) permet de se livrer plus facilement sur les préoccupations, quelque soit leur nature. L’espace de confidentialité créé offre une atmosphère favorable au partage des sujets les plus sensibles. Chacun adresse une problématique et repart avec des idées qu’il peut ou non mettre en place.
Le fait d’être dos à dos permet de ne pas être influencé par le non verbal des « consultants » et parler de manière sincère et authentique sans se censurer.
Il n’y a pas de restitution globale faite à la fin de l’atelier mais certains ont tenu à échanger sur les solutions proposées pour partager les bénéfices avec le groupe et voir si des actions concrètes pouvaient être identifiées et suivies.
À la suite de cet atelier, les perceptions de chacun ont évolué et une meilleure cohésion d’équipe a été observée. Cela a également permis de développer la confiance au sein du groupe à travers une assistance mutuelle.
Je conseille vivement cet atelier (en entrée de rétrospective par exemple) pour décharger mentalement les membres de l’équipe et partir sur des bases saines et solides. Personnellement, je trouve cet outil puissant et l’équipe a vraiment adhéré à la démarche. Tout le monde est ressorti avec le sourire et ce fameux sentiment de lâcher prise sur ce qui les polluait mentalement.